Le sommeil trouble de l’opérateur

CIRCA, Montréal, 2014-15
SPOROBOLE, Sherbrooke, 2015

FR
Un magnétophone à bobine est juché tout au haut d’un escalier de métal et fait jouer une bande audio. Mais au lieu d’embobiner soigneusement le ruban, le mécanisme de l’appareil le laisse plutôt s’échapper et glisser lentement sur un plan incliné. Au bas de cette pente, le ruban forme des arabesques qui s’accumulent les unes sur les autres. Au fur et à mesure qu’elles sont créées, les premières sont défaites, entraînées par la bande elle-même qui continue sa course pour remonter vers le magnétophone et compléter la boucle. Plus loin, une caméra reliée à un projecteur vidéo nous permet de voir, en temps réel et sous une forme magnifiée, ce processus toujours renouvelé.

La question du contrôle qui anime le travail de Sébastien Cliche est encore une fois au centre du dispositif. Mais le contrôle peut-il exister sans son contraire, le laisser-aller? Ce relâchement du contrôle, loin de générer le chaos, ne laisse-t-il pas plutôt la place à des processus d’autorégulation, sortes de mécanismes involontaires de contrôle? C’est du moins ce sur quoi compte l’opérateur au sommeil trouble, un personnage fictif responsable de ce système précaire qui risque de s’enrayer si les conditions minimales de sa bonne marche ne sont pas au rendez-vous.

Sébastien Cliche remercie le Conseil des arts et des lettres du Québec de son appui financier.

EN
The Uneasy Sleep of the Operator
A reel-to-reel tape recorder is perched at the very top of a metal staircase, playing an audio track. But instead of carefully rewinding the tape, the device’s mechanism is letting it get away and slowly slip onto a sloped surface. At the bottom of this slope the tape forms arabesques that pile up on top of one another. They are then undone as the tape continues along its path and goes back up to the tape recorder to complete the cycle. Farther on, a video camera connected to a projector shows us, magnified and in real time, this constantly repeated exercise.

The question of control that drives Sébastien Cliche’s work is once again at the heart of his project. But can control exist without its opposite, the lack of constraint? Does not this letting go of control, far from generating chaos, give rise instead to self-regulating processes, to involuntary control mechanisms? This, at least, is what the operator who sleeps uneasily is counting on, for this is the fictional character responsible for this precarious system which risks jamming up if the minimal conditions for its smooth operation are not in place.